۱۳۹۳ بهمن ۲۲, چهارشنبه

Venezuela : le coup d’Etat permanent

11 février 2015
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Barack Obama semble pressé de redorer son blason finissant, de rétablir des relations diplomatiques avec Cuba (pour la levée du blocus, c’est autre chose...) La sous-secrétaire d’Etat en charge de l’Amérique latine, Roberta Jakobson , et une importante délégation étatsunienne, viennent de rencontrer leurs homologues cubains, à La Havane, le 21 janvier 2015, pour y traiter (sans trop avancer) des questions migratoires entre les deux pays, de la « loi d’ajustement cubain » (que Washington refuse de supprimer) et de l’ouverture d’ambassades. Du jamais vu depuis plus de 50 ans...50 ans d’agressions unilatérales contre Cuba.

Comme était obligé de le reconnaître le président Obama dans son important « discours cubain » du 17 décembre 2014, la stratégie américaine envers l’île insoumise a finalement isolé Washington, et s’est avérée contreproductive pour « l’empire ». Quelle victoire pour ce peuple cubain qui n’a cessé de résister, dans des conditions particulièrement dures, parfois même inimaginables. Cet échec historique amène aujourd’hui l’impérialisme à changer de méthode (« invasion » de touristes, de dollars, aide au secteur privé, à « l’opposition »), mais, rappelons-le, sans abandonner son objectif de faire plier « la dictature cubaine ».

En apaisant ainsi le front cubain, Washington compte pouvoir se consacrer davantage au renversement de la révolution vénézuélienne et de son président, Nicolas Maduro. Cette liquidation, prioritaire, pourrait entraîner, selon la stratégie impérialiste, un effet « dominos », boule de neige... Si Caracas tombe, suivraient La Paz, Quito, La Havane, Managua, San Salvador...

Le Venezuela constitue donc bien, pour la Maison Blanche et le Pentagone, le « cœur d‘une cible ». Qu’attendent de nombreux démocrates pour s’en convaincre et agir en conséquence ? Faudra-t-il que le sang coule à flots pour porter la solidarité à la hauteur des enjeux ?

Au Venezuela, une « guerre de basse intensité » implacable, menée sous la supervision et planification nord-américaine, par une opposition haineuse, revancharde, se poursuit quotidiennement, plus ou moins violemment. Il s’agit pour l’extrême droite, la droite, les ex sociaux-démocrates, les agents et agences de Washington, les fondations « made in USA », de parvenir à battre le chavisme par la conjugaison, crescendo, de tous les moyens possibles :


- créer les conditions d’une défaite électorale aux législatives de décembre 2015


- fatiguer la population par les pénuries organisées, l’insécurité...


- déstabiliser le pays en développant une guerre économique multiforme (accaparement, à des fins spéculatives, d’aliments, de médicaments, de produits sanitaires), spéculations tous azimuts, hausse des prix, contrebande, marché noir, stockage illégal de produits de première nécessité, mise en place par les institutions financières internationales d’une sorte d’embargo financier du pays...


- mener une guerre idéologique de tous les instants, pour désinformer, manipuler, créer un effet extérieur repoussoir, un climat général de défaitisme (faux sondages ; « Le Parisien » du 23 janvier 2015 attribue à N. Maduro 22% d’opinions favorables ; « sondage » repris par « Le Monde » du même jour) et d’échecs inéluctables (« Maduro tombe tout seul », « La Nacion », 23 janvier 2015, « le postchavisme est une marche vers l’abîme », « TalcualDigital », 23 janvier 2015)


- isoler nationalement et internationalement la cible à abattre


- intensifier la stratégie anxiogène de la peur (conspiration permanente, crimes des paramilitaires infiltrés depuis la Colombie, sabotages, coupures d’électricité...)


- redoubler d’ingérence pour tenter de diviser le chavisme et l’armée populaire bolivarienne


- et au final, de nouvelles « guarimbas » : un soulèvement cette fois-ci réussi.

Lors de son discours de clôture à la « Rencontre des intellectuels pour la défense de l’humanité », le 14 décembre 2014, à Caracas (Cuartel de la Montaña), le président Nicolas Maduro révélait qu’en mars 2014, une tentative de coup d’Etat avait avorté. Un groupe d’officiers, « approchés par Washington », devait exécuter un plan élaboré au Pentagone et à la CIA. Un avion mercenaire, repeint aux couleurs du Venezuela, bombarderait en premier lieu les studios de « TeleSur » dans le nord de Caracas, afin d’étouffer l’information, puis le ministère de la Défense et le palais présidentiel de Miraflores.

Le plan fut détecté 48h avant sa mise en application et les putschistes furent emprisonnés. Selon le président : « ils auraient tous avoué » et « se repentiraient ». Comme leurs compères (une centaine) protagonistes du « golpe » de 2002-2003, ils se retrouvent lâchés par les politiciens qui les ont manipulés. Quelques officiers démis, écartés pour « activités complotistes », et les secteurs les plus « ultras » de l’opposition, préparent la seconde étape du « plan de sortie », afin d’obliger par la force le président Maduro à jeter l’éponge... Le gouvernement vient de rendre publiques, le 23 janvier 2015 (« Ciudad Caracas », « Correo del Orinoco »), des transcriptions d’écoutes téléphoniques qui mettent en cause le vice-amiral Iván Carratu Molina, les généraux Antonio Rivero et Ángel Vivas, le colonel de la GN José de Jesús Gómez Bustamante. En mars 2014, trois généraux avaient été arrêtés (« RT », 25 mars 2014)

Dans les dernières semaines de 2014, le gouvernement américain a fait adopter une provocatrice « loi de sanctions » contre un groupe de dirigeants chavistes et d’officiers loyalistes vénézuéliens ; il leur refuse notamment la possibilité d’obtenir un visa s’ils souhaitent se rendre aux Etats-Unis. Ces sanctions visent, selon leurs instigateurs, à saper le moral des forces armées. On peut donc effectivement parler de « coup d’Etat permanent », de « stratégie (globalement) à la chilienne » (« Laverdad.com », 23 janvier 2015). L’opposition a mis au point une nouvelle stratégie : provoquer des pénuries, puis des affrontements et le pillage de magasins lorsque des queues se forment devant tel ou tel supermarché (« Laverdad.com », 19 janvier 2015)

Face à l’offensive déstabilisatrice multiforme, le « président-prolétaire » met les bouchées doubles sur le front principal : l’économie. Malgré la crise, l’effondrement du prix du baril de pétrole (au-dessous de 40 dollars), les budgets sociaux ne sont pas amputés .

Une nouvelle augmentation de 15% des salaires et pensions permet de maintenir le pouvoir d’achat face à une inflation élevée (64% fin 2014). La « Loi des prix justes », qui entre en vigueur en janvier 2015 (« Ciudad Caracas », 22 janvier 2015), doit permettre de s’attaquer à la spéculation et de contrôler des prix qui souvent s’envolent. La marge maximale de bénéfice ne doit pas désormais dépasser 30%. Les importants accords de coopération signés à Pékin avec la Chine, lors de la visite du président Maduro, les 6 et 7 janvier 2015, s’élèvent à 20 milliards de dollars d’investissements... et ils préoccupent « l’Occident ». C’est plutôt bon signe ! Sur ce front économique se jouent les prochaines législatives de décembre 2015.

L’effort de redressement économique passe par l’intervention citoyenne, fortement stimulée, par la démocratisation de l’Etat, la création et l’installation, à partir de septembre 2014, de « conseils présidentiels » intégrant les mouvements sociaux, par l’élargissement du « pouvoir populaire ». La « Loi organique de planification publique et populaire » oblige l’Etat à consulter en permanence les citoyens, à planifier avec eux, avec les « communes socialistes » (gouvernements locaux) et les conseils communaux l’attribution des ressources aujourd’hui limitées par la baisse inquiétante des prix du pétrole...

Comme on le voit, « Maduro ne s’en remet pas à Dieu pour résoudre la crise économique », comme ironisait platement « Le Parisien » du 23 janvier 2015, mais au peuple. Le « président peuple » s’en remet au peuple. Chiche...



Source : Le Journal de Notre Amérique n°1, Investig’Action, Février 2015.

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