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4 septembre 2015
Le 18 juin dernier, à Charleston, en Caroline du Sud, un acte terroriste a été commis contre un groupe de personnes de couleur noire qui s'étaient réunies pour prier. Un homme blanc âgé de 21 ans, Dylann Storm Roof, suspecté d'être l'auteur de cette brutale et horrible tragédie, a été arrêté. Qui a appris à Roof à détester les Noirs au point de tuer neuf d'entre nous dans un sanctuaire ? Et peut-on vraiment affirmer qu'il est le seul ?
L’Eglise Episcopale Méthodiste Africaine Emanuel était un symbole de la lutte contre l’esclavage depuis 1822 et l’une des plus anciennes églises noires du pays. Nos cœurs et nos prières sont avec les familles et les communautés de ceux qui ont été tués inutilement. Un homme blanc âgé de 21 ans, Dylann Storm Roof, suspecté d’être l’auteur de cette brutale et horrible tragédie, a été arrêté. Roof s’est rendu à l’église et a demandé à voir le pasteur. Il a prié avec la congrégation et, au bout d’une heure environ, il s’est levé et a prononcé les paroles suivantes : « Il faut que je le fasse. Vous violez nos femmes et vous nous prenez notre pays. Et vous devez partir. »
Dans les jours qui ont suivi, beaucoup de médias décriront Roof comme un tireur atteint de maladie mentale, ayant un passé trouble, qui a commis un crime isolé contre un groupe de personnes noires qui ne se doutaient de rien.
Des photos publiées sur Facebook montrent Roof vêtu d’une veste avec un écusson correspondant au drapeau de l’Afrique du Sud sous l’apartheid.
A #BlackLivesMatter (#LaViedesNoirsCompte, NdT) cependant, nous affirmons que cet acte n’est en réalité pas isolé, et qu’il fait partie d’une série de violences exercées contre les personnes noires dans ce pays et à travers le monde.
La vraie question que nous devrions poser est la suivante :
Qui a appris à Roof à détester les Noirs au point de tuer neuf d’entre nous dans un sanctuaire ? Et peut-on vraiment affirmer qu’il est le seul ?
La réponse honnête à cette question est que ce pays n’a jamais mis en valeur les personnes noires – alors que les personnes noires sont extrêmement précieuses pour ce pays.
Nous n’étions pas censés survivre. Nous avons été arrachés à nos familles et à notre terre, emmenés dans ce pays au fond de bateaux, enchaînés comme des animaux. Nous avons été forcés à travailler pour un pays, à l’élever, à le nourrir et à le construire, et celui-ci ne nous a jamais considérés comme humains et refuse toujours d’honorer notre humanité.
Les documents fondateurs de ce pays nous désignent comme ne valant que trois cinquièmes d’un être humain. Quand nous avons osé (et osons toujours) réclamer notre humanité, nous avons été (et sommes toujours) battus, lynchés, pendus à des arbres, mutilés, brûlés, ciblés par des armes à feu et violés.
Ce n’est pas quelque chose qui appartient au passé. Des personnes noires subissent toujours cela en 2015. Comme, il y a quelques mois de cela, quand Otis Byrd a été retrouvé lynché et pendu à un arbre à proximité de Jackson dans le Mississippi.
Nous n’étions pas censés survivre. Nous affirmons que les actes de Roof ne sont pas isolés et qu’on ne peut pas si facilement et avec tant de dédain les attribuer à une maladie mentale, mais qu’ils sont plutôt le reflet d’une maladie qui gangrène ce pays : le racisme. Et nous affirmons que, tant que nous ne viendrons pas à bout, en tant que nation, de cette violence raciste qui infecte ce pays, de tels actes ne seront que plus fréquents à l’avenir.
Les mots de Roof nous rappellent que nous, les personnes noires, n’avons nulle part dans ce pays où nous pouvons nous considérer en sécurité. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce que la police nous protège. Nous ne pouvons pas nous attendre à être en sécurité dans les piscines, les églises, les commerces, les bus, dans nos communautés et même dans nos foyers. Les enfants noirs ne sont pas à l’abri. Et nous ne pouvons pas nous considérer comme étant à l’abri d’être traumatisés au quotidien par la violence exercée contre notre communauté. Dans ce cas précis, une jeune fille a survécu en se faisant passer pour morte alors qu’elle se trouvait sous le corps de sa grand-mère décédée. Roof a décidé d’épargner une femme, lui expliquant qu’il voulait qu’elle raconte ce qu’il s’était passé cette nuit.
La vérité que nous nous devons de dire est que même le premier président noir de notre pays doit toujours affronter le fait que la violence contre les personnes noires est une épidémie qui a atteint des proportions énormes.
Alors que les statistiques démographiques montrent que les personnes de couleur vont devenir la majorité, il existe à la fois une peur rationnelle et irrationnelle que ces mêmes personnes qui ont été et seront les plus touchées par cette violence flagrante et brutale continueront à résister. Les mots de Roof : « Vous nous prenez notre pays. Et vous devez partir » reflètent la peur sur laquelle la droite capitalise depuis les années 70 qui est que la majorité devienne la minorité.
Et, comme les personnes noires le savent si bien, être en minorité quelque part peut littéralement signifier la différence même entre la vie et la mort.
Le jour même du massacre, le président Obama a fait la déclaration suivante : « Une fois de plus, des innocents ont été tués en partie parce qu’un individu qui voulait faire du mal n’a eu aucun problème à mettre la main sur une arme à feu. » Malgré ce que dit notre président, il ne s’agit pas seulement d’un problème de contrôle des armes à feu. C’est en réalité un problème de prévalence structurelle d’un racisme anti-noir qui aboutit dans de nombreux cas à une violence anti-noir et de trop nombreuses fois à des meurtres anti-noir.
A travers le pays, et à travers le monde entier, les personnes noires – vieux, jeunes et entre deux âges ; handicapés et invalides ; gays ; transgenre ; immigrants ; prisonniers et bien d’autres – se sont élevées dans une vague de rébellion qui a transformé notre paysage politique. Et pourtant, il y en a toujours qui, face à la violence inutile et extrême, en profiteront pour appeler à la paix, pour déformer la réalité des vrais problèmes, et pour globalement neutraliser ce qui bouillonne en profondeur depuis très longtemps.
Mais où sont les appels pour que ceux qui ont appris à un jeune homme blanc à arborer une si violente haine envers les Noirs rendent des comptes ? Qui répondra d’une nation qui a le racisme inscrit dans son ADN même ?
En tant que nation, nous avons un choix à faire face à toujours plus de vies enlevées à des Noirs bien avant l’heure. Il n’est plus question de savoir si le racisme existe ou pas, ni une question de savoir si le racisme est une maladie qui gangrène notre existence même ou pas. La vraie question est de savoir si nous allons enfin vouloir prendre la décision de nous y attaquer de manière réelle ou pas.
Source :
Copyright Truthout.org. Reprinted with permission.
Cette traduction du texte original en anglais est reproduite avec l’aimable autorisation de l’éditeur Truth-out.
Traduction : Collectif Investig’Action
Cette traduction du texte original en anglais est reproduite avec l’aimable autorisation de l’éditeur Truth-out.
Traduction : Collectif Investig’Action
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