۱۳۹۳ اسفند ۲۵, دوشنبه

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16 mars 2015
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À la veille des élections législatives en Israël, nous avons interrogé Michel Warschawski sur les enjeux de ce scrutin. L'occasion pour ce militant pacifiste israélien de commenter la passe d'armes entre Obama et Netanyahou. Il nous explique également comment le fascisme s'est installé en Israël et pourquoi la Palestine est un symbole de la résistance globale.

Nous sommes à la veille d’élections législatives en Israël. Pensez-vous que ce scrutin peut amener des changements significatifs dans les relations entre Israël et la Palestine dans la mesure où l’on a pu assister à diverses actions progressistes ces derniers temps : manifestations contre l’austérité, prise de position de vétérans de l’armée contre la colonisation, etc.

Tout d’abord, il faut relativiser ces mouvements. Les Indignés en 2011 ont malheureusement été un feu de paille. Les autres restent assez marginaux même s’ils peuvent avoir une importance symbolique. Je pense notamment aux vétérans de l’unité 8200 spécialisée dans la collecte de renseignements. Ils ont dénoncé la politique d’espionnage généralisé visant les Palestiniens.

Quant aux élections, je n’en attends pas de grands changements. Même si le parti de Netanyahou perd des voix, les autres composantes de la droite resteront très fortes. Le centre-gauche pourrait devenir la première force du pays, ce dont je ne suis pas sûr. Mais il sera incapable de faire une coalition et sera donc obligé de faire un gouvernement d’union nationale. Le centre-gauche a d’ailleurs annoncé qu’il le fera. Or, un gouvernement d’union nationale, ça veut dire qu’on continuera à faire la même chose. Pour moi, ces élections sont un coup pour rien.

Vue d’Europe, la campagne aura notamment été marquée par l’appel de Netanyahou adressé aux juifs européens pour qu’ils émigrent en Israël. Peut-on y voir la stratégie électorale d’un Premier ministre aux abois ?

Je ne pense pas qu’il faille lier cet appel aux élections. C’est le discours sioniste récurent et habituel. Sauf qu’avec Netanyahou, c’est toujours plus grossier et plus vulgaire. Son appel reste scandaleux. Israël n’est pas un pays plus sûr pour les juifs européens. C’est un pays en guerre permanente. L’appel de Netanyahou est donc absurde. Je ne pense même pas qu’il croit vraiment ce qu’il dit.

Je voudrais souligner que contrairement à des institutions telles que le CRIF, les juifs du Danemark ont complètement rejeté l’appel de Netanyahou qui avait suivi l’attentat de Copenhague. Ils avaient dit : « Nous sommes des Danois ! C’est notre pays ici, et on ne part pas. »

Cet appel est-il lié à un problème démographique en Israël ?

Oui, ça a toujours été la volonté de tous les gouvernements israéliens : faire venir un maximum de juifs pour préserver une majorité juive confortable et maintenir Israël comme État juif. C’est ça l’objectif du sionisme. Si les juifs devaient partir dans un pays du Moyen-Orient où ils seraient en minorité, autant rester où ils sont.

Vous dîtes que les élections seront un coup pour rien et que la droite restera majoritaire. Comment expliquer cette domination politique ?

On a assisté ces dernières années à un glissement à droite de la politique israélienne. Ça n’a pas été le fruit d’un coup d’État. Ça s’est produit à travers des élections démocratiques. En fait, plus qu’un glissement à droite, on peut parler de fascisation de la société israélienne. Tant au parlement que dans les médias, un discours s’est complètement lâché. Aujourd’hui, le climat est pourri en Israël.

Si ce pays voulait vraiment être « la seule démocrate du Moyen-Orient », il défendrait les valeurs du monde démocratique. Or, dans son discours, le gouvernement israélien ne s’identifie plus à la démocratie, mais à la guerre contre le terrorisme.

Comment ce changement s’est-il produit ?

Il faut revenir en arrière. Après la chute de l’Union soviétique, un nouveau courant politique pro-israélien a émergé aux Etats-Unis, celui des néoconservateurs. Ça a été une véritable révolution ou plutôt une contre-révolution au niveau de la pensée politique. Parmi les fondateurs de ce mouvement, on retrouve un certain Netanyahou.

Pour les néoconservateurs, la chute de l’Union soviétique avait mis fin au bipolarisme d’après-guerre. Un nouvel ordre mondial était nécessaire et le 21e siècle devait être le New American Century. Les Etats-Unis et leur petit toutou israélien pensaient ainsi pouvoir revendiquer une hégémonie globale sur le monde. Mais pour cela, il fallait reconquérir ce qui avait été perdu après la Deuxième Guerre mondiale, ce qui avait été décolonisé dans le Tiers-monde et tout ce qui avait été acquis comme droits sociaux et droits humains.

La stratégie de recolonisation du monde est un concept inventé par Netanyahou. Il s’agit d’une guerre globale, préventive et permanente. Cette guerre est livrée partout sur la planète, mais le Moyen-Orient est la ligne de front. La construction du mur en Cisjordanie doit être ainsi vue comme un mur qui coupe le monde en deux. D’un côté, il y a la Palestine, la Syrie, l’Irak, l’Afghanistan, bref, les « barbares ». De l’autre, il y a Israël, l’Europe, les Etats-Unis, soit le « monde civilisé ». Ce mur est aussi devenu un laboratoire avec tous ses checkpoints et ses technologies sécuritaires qui s’exportent notamment aux Etats-Unis pour surveiller la frontière avec le Mexique. Même les barons de la drogue colombiens s’approvisionnent en Israël pour la technologie sécuritaire.

La ligne de front dont vous parlez explique-t-elle l’importance symbolique de la résistance palestinienne ?

Tout à fait. Le drapeau palestinien est devenu l’étendard de la résistance globale. On voit des drapeaux palestiniens dans des manifestations qui n’ont rien à voir. C’était pareil dans les années 60 avec le drapeau vietnamien. La Palestine est au cœur de l’info et de l’opinion publique depuis au moins vingt-cinq ans. Les dirigeants israéliens ne comprennent pas pourquoi. Ils se demandent : « Qu’est-ce qu’ils nous veulent ? Il y a plein de problèmes dans le monde, ils ne parlent que de nous. Ils doivent être antisémites ! »

Le problème du gouvernement israélien, c’est qu’il n’a pas changé alors que le monde a changé. La guerre globale s’est rapidement révélée être un échec. Il n’y a pas eu d’hégémonie US et les Etats-Unis doivent négocier avec d’autres puissances qui ont émergé. Mais le gouvernement israélien est resté bloqué à la stratégie de Bush et il attend que ça revienne.

Ça explique les contradictions entre Netanyahou et Obama ?

Pour Netanyahou, Obama est une erreur de casting, un accident. Il y a quelque chose qui n’a pas marché. Il pense qu’on a élu un nègre qui ne comprend pas bien les problèmes de notre région. En réalité, l’alliance USA-Israël va mal. On commence à réaliser aux Etats-Unis qu’Israël va devenir un boulet. Ils se mettent tous les États arabes et musulmans à dos, tout ça pour soutenir Israël. Et ce soutien coûte trois milliards de dollars par an auxquels il faut ajouter le bouclier diplomatique.

Même au sein de l’appareil sécuritaire israélien, on se pose des questions. Contrairement aux politiques, les militaires pensent. Ils sont le dernier cercle de réflexion de l’élite israélienne. Ceux qui sont en place se taisent, mais les vétérans sont plus bavards. Et ils disent qu’on va droit dans le mur avec cette politique. On ne pourra pas éternellement tourner le dos au Moyen-Orient.

Source : Investig’Action


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