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Lettre à un ministre socialiste Elisabeth Beague | 30 janvier 2015

30 janvier 2015
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Le politique préfère réduire les dépenses publiques plutôt qu'imposer les entreprises, l'Etat gère le déclin, à la merci de la troïka qui en détient la maîtrise. En réalité, l'Etat ne décide plus rien mais organise les configurations des mesures qui ne sont plus de son ressort. L’Etat se mord la queue. Il est temps que le politique se réveille ! Le rôle de l'Etat n'est-il pas de surveiller, de réguler, afin de rendre l'économie plus efficace et au service de tous ?



Monsieur le Ministre, cher Monsieur,

Vous ai-je suffisamment remercié de m’avoir accordé un rendez-vous le 19 juillet 2014, un samedi de grandes vacances et de canicule ? Je n’en suis pas sûre et j’en fais amende honorable.

J’ai souvent repensé à cet entretien au cours duquel j’ai tenu le crachoir avec mes questions impertinentes : "Le socialisme est-il encore social ? Notre pays est-il toujours une démocratie ? Quelle est la pertinence d’une politique de l’offre en période de bas salaires ? A quoi servent les impôts si l’entreprise privée remplace l’Etat ?"

J’espérais une réaction, des réponses précises. Mais vous aviez sans doute un devoir de réserve à respecter, un consensus à ne pas trahir. Votre quasi seule phrase, que j’ai précieusement enregistrée, fut "L’Europe est très courtisée. Par les Etats-Unis, par la Russie, par la Chine".

J’attendais la suite, j’ai donc attendu au lieu de poser alors les questions qui me venaient à l’esprit "L’Europe est-elle à vendre ? Pourquoi alors ne pas faire monter les enchères ? Et, dans ce contexte, quelle est la place de la vie ? Est-elle encore d’utilité publique ?", questions que je me pose toujours. Notez que j’ai bien compris la stratégie actuelle qui consiste à comprimer les salaires, à négliger la consommation intérieure, pour ne favoriser que les exportations. Toujours la fameuse balance …

Entre-temps Syriza a gagné et j’espère que cette victoire bousculera la léthargie dans laquelle la Belgique s’est assoupie. "Gauche, droite, gauche, droite" dit-on à l’armée. N’y a-t-il donc pas d’alternative ?

Belle alternative actuellement que soumission aux marchés avec empressement ou soumission aux marchés sous les menaces. T.I.N.A. (There is no alternative (NdR) n’est plus de saison, il y a, c’est évident, un autre modèle à inventer et la Grèce aujourd’hui nous en a donné une idée : fin de l’humiliation des peuples, fin de la spéculation meurtrière, réveil de la créativité, non aux pansements qui prolongent les plaies mais ne les soignent pas. Il est temps qu’un mouvement se prétendant socialiste réagisse contre le camp de cette impitoyable conspiration monolithique qu’est le néolibéralisme.

L’imagination des instances au pouvoir est sans limites quand il s’agit de distraire la galerie. Ne pourrait-elle pas - enfin - servir à autre chose ? La démocratie ne signifie en effet pas grand-chose quand les individus se retrouvent confrontés à une hyper-concentration du pouvoir économique, quand le travail est bradé, quand les gouvernements sont asservis à une économie privée toute puissante. Il est vrai que l’électorat exige des réponses rapides. Mais, pour éviter de faire trop de mécontents, taper toujours sur les mêmes ? Pitié ! Varions le jeu ! Le "socialisme" n’est-il pas censé prendre soin des gens ? « Blabla », penserez-vous peut-être. Il est vrai que je répète ce qui a déjà été dit souvent. N’empêche, je pense que quand le mur résiste, il ne faut pas se lasser de taper sur le clou.

Revenons à La Grèce, berceau de la démocratie, de la philosophie, de l’astrologie, des sciences et ... du théâtre. Faisons du théâtre ! Soyons créatifs ! Osons ! Avouons que nous ne sommes pas éternels, que des empires ont périclité mais qu’au moins ils sont descendus de haut, de très haut, qu’ils n’ont pas été écrasés d’un coup de talon ni anéantis par la cote d’une agence de notation.

Actuellement, nos Etats ne sont que des décors de théâtres dont les multinationales sont les acteurs et l’argent public ne fait que fortifier un système malfaisant. Les multinationales et les grandes banques se révèlent être des réseaux asociaux qui ont en tout cas excellé dans la destruction des emplois puisqu’il n’y a aucun rapport entre les innovations financières et une hausse de la productivité. De plus, nous constatons tous les jours les dégâts des partenariats public-privé : l’Etat supporte le risque, le privé empoche les profits alors qu’il reste encore le seul à bénéficier des largesses d’un Etat-Providence.

L’entreprise se voit offrir mille subventions, exonérations, opportunités diverses pour qu’elle se porte bien et puisse embaucher. Elle empoche mais n’embauche pas et menace de délocaliser. Le chômage augmente et une nouvelle aide va à l’entreprise. Il a toujours été prévisible que l’aide à l’entreprise ne créerait pas d’emplois mais on persévère, on s’entête dans cette voie et le carrousel continue à tourner sans que l’on veuille s’apercevoir que la suppression d’emplois devient un mode de gestion, une variable d’ajustement, une source d’économies, un agent essentiel du profit.

L’économie n’investit plus, elle mise. L’insécurité du travailleur est méthodiquement étudiée, la précarité des sans-emploi délibérément programmée. Le politique préfère alors réduire les dépenses publiques plutôt qu’imposer les entreprises, l’Etat gère le déclin, à la merci de la troïka qui en détient la maîtrise. En réalité, l’Etat ne décide plus rien mais organise les configurations des mesures qui ne sont plus de son ressort. L’Etat se mord la queue.

Il est temps que le politique se réveille ! Le rôle de l’Etat n’est-il pas de surveiller, de réguler, afin de rendre l’économie plus efficace et au service de tous ?

Nous ne voulons pas retourner au 19è siècle sous prétexte de modernité, nous ne voulons pas de ces réformes "structurelles" que sont les privatisations, la remise en question du droit du travail, la disparition de la sécurité sociale.

Nous ne voulons pas assister à un suicide collectif sous prétexte de concurrence et de compétitivité, ces mythes qui se répètent avec un zèle jamais démenti malgré tous les dégâts qu’ils engendrent.

Nous ne voulons plus que notre rôle se limite à consommer pour favoriser une croissance hypothétique qui, de toute façon, ne bénéficiera ni à la cohésion sociale ni au bien-être.

Les peuples sont las, ils ont assez donné, la "pensée unique" ne les satisfait plus.

Nous voulons vivre dans une société qui accorde de l’importance à chaque personne et ne s’intéresse pas seulement à son compte en banque. Nous voulons des hommes politiques forts et, enfin, "socialistes" !

PS : Vos intentions de « démocratie participative » pourraient être louables si elles n’imposaient pas la réunion de 100.000 signatures pour ouvrir la discussion sur un sujet précis.

Source :

Investig’Action

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