Déficit budgétaire : le dernier gros bobard ?
- 17 Jul 2017
Van Overtveldt (ministre des Finances N-VA) doit une fois de plus chercher quatre milliards pour éliminer le déficit budgétaire. Pour cela nous devrons encore, selon le ministre, « consentir des efforts importants ». Faut-il en rire ou en pleurer ?
A force de répéter une chose, les gens finissent par y croire. C’est le cas du budget annuel et du prétendu déficit. Nous connaissons tous ces lieux communs : « il n’y a pas d’argent », « nous vivions au-dessus de nos moyens », ou encore « il faudra y arriver avec moins d’argent ».
Or c’est tout le contraire. Selon l’hebdomadaire Trends il y a justement trop d’argent. L’économie belge a un excédent (1) de dizaines de milliards d’euros, peut-être bien plus de cent milliards d’euros. L’excédent de trésorerie, ou cash pile, cela veut dire que des entreprises ou des particuliers ne savent pas quoi faire de ce capital. Elles ont littéralement un excédent et ne peuvent ou ne veulent pas l’investir parce que cela ne rapportera tout de même rien. Ce ce genre d’argent qu’on retrouve à Pananma, aux Bahamas ou dans d’autres havres fiscaux.
Une autre partie de cet argent est utilisée pour une consommation délirante ou plus exactement décadente. Le quotidien économique Financial Times édite un magazine bimensuel sous le titre ‘How to spend it’. Dans le numéro de la mi-juin les richards pouvaient se gaver de yachts. En tête de liste, le Yacht 155 de Sunseeker. Il ne coûte guère que 32 millions d’euros. Si un ménage moyen peut mettre de côté un cinquième de ses revenus, il devra en moyenne épargner pendant 3.800 ans pour pouvoir acheter ce yacht. Mais pas de regret, on peut déjà se louer un Benetti pour 650.000 euro par semaine ….
La raison pour laquelle les entreprises ne peuvent faire des investissements rentables est la conséquence des économies : les gens ont moins de pouvoir d’achat et peuvent donc moins consommer. Dès lors il faut moins produire et ces investissements ne sont donc pas rentables. Pouvoir d’achat en baisse et consommation décadente : ce sont les deux faces d’une même médaille.
Mais concentrons-nous sur cette montagne d’argent. Elle grossit d’année en année et cela n’a rien d’étonnant. D’un côté les investissements ne sont plus rentables et par ailleurs les grandes entreprises échappent de plus en plus à l’impôt. Les 50 principales entreprises belges réunies ont tout bonnement payé 6,9 milliards trop peu au fisc.
On pourrait faire beaucoup de choses avec ces sommes fraudées à l’impôt. Si la banque KBC payait décemment ses contributions, on pourrait sans problème refinancer l’enseignement, à hauteur de 730 millions par an. Si AB InBev en faisait autant, 6.000 infirmières supplémentaires pourraient être recrutées. Si Solvay, Atlas et quelques autres entreprises acquittaient leur taux d’imposition normal, les listes d’attente dans le secteur soins de santé disparaîtraient immédiatement. Et ainsi de suite.
Les entreprises sont avares quand il s’agit d’impôts, mais elles se sont munificentes à l’égard de leurs actionnaires. En 2014 les entreprises belges ont distribué environ 12,6 milliards d’euros de dividendes, ce qui revient à 1.115 euros par Belge. C’est évidemment une moyenne. Le gros de ces versements bénéficie à un très petit pourcentage de la population. Les autres doivent se passer de dividendes et peuvent continuer à se serrer la ceinture.
Nous ne nous en rendons pas toujours compte, mais nous sommes un pays particulièrement riche. Avec une répartition équitable, un ménage de deux adultes et deux enfants aurait un revenu moyen disponible de 8.650 euros par mois ! Mais la répartition est tout sauf équitable. En réalité un ménage moyen peut déjà s’estimer heureux avec la moitié de cette somme.
Le problème n’est pas le manque d’agent, il y en a plus qu’assez. Le problème est qu’il est réparti de manière inéquitable. Le problème est qu’une petite couche supérieure est scandaleusement riche et ne sait pas quoi faire de sa richesse, alors que la population laborieuse et les couches inférieures de notre société sont de plus en plus exploitées.
Cessons donc de propager cette fable et de croire que nous vivons au-dessus de nos moyens. Nous avons besoin d’urgence d’un taxshift draconien, mais alors un taxshift qui irait dans le sens inverse du précédent.
(1) : Le revenu net disponible est de 28.700 dollar par personne sur une base annuelle. Converti en euros, pour un ménage avec deux enfants et deux adultes, cela revient à 8.650 euros par mois.
://www.oecdbetterlifeindex.org/countries/belgium/.
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Traduction du néerlandais : Anne Meert pour Investig’Action
Source: Investig’Action/Trends (et Knack)
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