۱۳۹۴ تیر ۱۶, سه‌شنبه

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7 juillet 2015
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La population grecque a commis quelques fautes capitales, que l'UE ne ne peut tolérer. Elle a porté au pouvoir un gouvernement de gauche, elle veut rompre avec la politique de démolition néolibérale et elle a le culot de vouloir organiser une consultation populaire.



« Ce qui est en train de se produire avec ces mesures d’austérité, c’est vraiment la lutte des classes ». (Noam Chomsky)

Tant va l’amphore à l’eau qu’à la fin …

Après cinq années de mesures d’austérité draconiennes imposées par la Troïka [1], la situation était sans issue pour les Grecs. Jamais depuis la Seconde Guerre mondiale on n’avait vu de tels chiffres dan un pays occidental. Le PIB avait baissé de 27 %. La dette publique, autour de quoi tout tournait, était passée de 100 à près de 180 %, devenant impayable. Les dépenses publiques ont été réduites d’un tiers, et l’administration publique est aujourd’hui complètement désorganisée. La débâcle économique s’accompagne d’un bain de sang social. Le chômage est passé à 28 % et lechômage des jeunes à plus de 50 %. Le revenu des ménages a baissé de 35 %. Quelque 30 % de la population vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté. Partout on voit des gens fouiller les poubelleset le nombre de suicides a doublé.

Mais cela ne suffisait pas encore. Question de réputation, le FMI a été amené par l’Allemagne à faire en sorte que les mesures à l’encontre des Grecs soient suffisamment sévères. Le Fonds, qui dans les années ’80 et ’90 a fait un carnage dans des dizaines de pays du tiers-monde, a parfaitement exécuté ce qu’on en attendait : continuer à tailler dans le vif.

Beaucoup de pensionnés grecs avaient vu leur pension réduite de 45 %. Mais ce n’était pas encore assez. Lors des dernières négociations, le FMI exigeait une nouvelle économie de 1,8 milliards d’euro sur les pensions. Et il faut savoir que pour 49 % des ménages, l’allocation d’une pension est le revenu principal …

Des péchés impardonnables

Pour Thomas Piketty l’ironie veut que les économies soient imposées par deux pays, l’Allemagne et la France, qui ont eux-mêmes tiré profit de remises de dettes après la Seconde Guerre mondiale, mesure qui a permis la croissance économique en Europe. Martin Wolf, chef économiste au Financial Time, ajoute qu’aucune démocratie ne sortira indemne d’une dépression de cette ampleur. La dernière fois que l’Allemagne avait eu à affronter une telle dépression, Hitler était arrivé au pouvoir.

Des économistes sérieux comme les lauréats du « Nobel » Stiglitz et Krugman, estiment que les dettes de la Grèce ne sont pas remboursables – voire qu’elles sont illégitimes – et qu’un effacement partiel est nécessaire. C’est parfaitement possible. Le PIB de la Grèce représente moins d’1 % de l’Union Européenne. Le remboursement manqué au FMI vaut environ 0,01 % du PIB de l’UE. Economiquement l’impact est donc nul. Il faut donner une leçon aux Grecs et à leurs sympathisants.

S’ils ne se plient pas aux diktats de l’élite européenne et du FMI, il faut qu’ils saignent, car ils ont commis trois péchés impardonnables.

Voter à gauche

La première grande faute des Grecs c’est qu’ils ont voté en faveur d’un gouvernement de gauche, qui veut rompre avec la politique de démolition de l’UE. C’est intolérable et il faut à tout prix l’étouffer dans l’oeuf, car cet exemple pourrait être suivi dans d’autres pays. En Amérique du Sud l’élection de Chavez en 1998 a représenté une tendance pour tout le continent, ce fut le début d’une vague de gauche.

Dans neuf mois il y a des élections au Portugal, en Espagne et en Irlande. Si Syriza devait marquer des points, les choses pourraient très mal tourner pour la droite. C’est pourquoi les Grecs ne peuvent pas être un exemple, il faut qu’ils saignent. Rajoy, l’actuel Premier Ministre d’Espagne se réjouit en tout cas que les banques en Grèce soient mises en cale sèche et que le chaos menace. Plus ça va mal en Grèce, plus ses espérances électorales s’améliorent. Et alors il pourra peut-être arriver à placer sa politique asociale : « Quand je vois ce qui se passe avec d’autres en ce moment, on peut dire que ça (les mesures d’austérité) en valait la peine ».

Décider souverainement

Une deuxième grande faute commise par les Grecs c’est de penser qu’ils ont le droit et la capacité d’agir souverainement. La Commission européenne s’est habilement servie de la crise financière en 2008 pour retirer leurs principales compétences économiques aux autorités nationales.

Il s’agit de ce qu’on appelle le « six-pack ». Ce paquet de six règlements et directive impose aux états nationaux un carcan macro-économique assorti d’amendes. Les conséquences en sont importantes pour la fixation des conditions de travail, des salaires, de l’âge de la pension, etc. C’est ainsi que la souveraineté des états nationaux sur le plan socio-économqiue a été complètement rabotée. Les parlement peuvent toujours discuter des points et des virgules, mais les lignes de forces sont fixées ailleurs. Le Premier Ministre Tsipras à osé remettre en question ce carcan et exiger le droit de décider souverainement de l’économie de son pays. Il avait notamment l’intention d’imposer d’une taxe unique de 12 % les bénéfices d’entreprise dépassant 500.000€. Vous vous rendez compte ! C’était la goutte de trop et c’est alors que la Troïka lui a posé unultimatum. Si les Grecs pouvaient suivre leur propre chemin, ils auraient vite des émules et l’élite européenne perdrait largement son contrôle sur le cours social de l’Union. C’est inadmissible. Si les Grecs doivent en pâtir et leur sang couler, il en sera ainsi.

Consulter la population

Troisième péché capital : l’organisation d’un référendum. Cela ne se fait pas. L’UE n’est pas issue de la volonté du peuple de ses habitants. C’était et c’est toujours un projets des grandes multinationales. Malgré les efforts rageurs de l’élite politique et les campagnes médiatiques de masse, les citoyens n’ont jamais beaucoup soutenu le projet. Le projet européen a été exposé le moins possible à l’électeur et lorsque des référendums ont néanmoins eu lieu, le projet a presque toujours été rejeté par les électeurs.

Il est tout à fait exclu que des décisions importantes soient jetées en pâture au bon vouloir de la population. Où cela finirait-il ? Imaginez qu’on organise chez nous un référendum portant sur une taxe des millionnaires – plus de 80 % y sont favorables – ou sur l’augmentation de l’âge de la retraite, ou sur le saut de l’index. Si on commençait à autoriser tout ça, c’est serait vite fini de la politique destructrice de l’UE.

Là aussi il fallait châtier les Grecs. C’est la Banque Centrale Européenne (BCE) qui s’est chargée de la sale besogne. Juste après l’annonce du référendum, la BCE a partiellement refermé la pompe à fric. Ils ont encore donné aux Grecs juste de quoi éviter le chaos sur les marchés financiers, en évitant que la Grèce ne soit exclue d’emblée de la zone euro. Mais le débit d’argent est bien sûr insuffisant pour que les banques puissent fonctionner normalement, avec les conséquences bien connues. Stratfor, un laboratoire d’idées conventionnel aux Etats-Unis l’exprime ainsi : « Si ce n’avait mené à une catastrophe économique et sociale, d’autres pays européens pourraient envisager d’appliquer l’option grecque ».

Ne pas plier

Le référendum du dimanche 5 juillet a opposé grosso modo deux blocs. Le bloc du non, soit les couches inférieures de la population (chômeurs, pensionnés, faibles revenus) qui n’ont plus rien à perdre, et le oui : les revenus élevés d’autre part, qui n’aiment pas Syriza et craignent pour leur position de privilégiés. Une incroyable pression s’est exercée sur la population pour la faire plier. Un membre de Syriza au Parlement européen compare la situation à celle du début des années ’70 au Chili, juste avant le coup d’état contre Allende. Là aussi, il s’agissait de saigner la population.

Les Grecs n’ont pas plié. Ils méritent notre entière appréciation et notre solidarité. 

[1] Commission Européenne, Banque Centrale Européenne Centrale et Fonds Monétaire International.

Traduction du néerlandais : Anne Meert pour Investig’Action.
Source : Investig’Action

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